Concertation Nationale et dialogue multi-acteurs sur les systèmes alimentaires

Sous le patronage du Haut-Commissaire à l’Initiative 3N (Les Nigériens Nourrissent Les Nigériens), Coordonnateur National des Concertations sur les Systèmes Alimentaires, une journée de dialogue national multi-acteurs portant sur le thème intitulé « Quelles actions de transformation des systèmes alimentaires pour la modernisation du monde rural et l’amélioration de l’état nutritionnel des nigériens » s’est déroulée à l’hôtel Bravia de Niamey, le 16 Juillet 2021.

La concertation nationale muti-acteurs a été organisée par le Haut-Commissariat à l’Initiative 3N en collaboration avec la FAO, L’UNICEF, le PAM, l’OMS, la PNIN et le GRET. Une centaine de participants venant de tous les secteurs concernés par les systèmes alimentaires ont participé à cette journée de dialogue national sur les systèmes alimentaires. Deux allocutions ont été prononcées lors de la cérémonie officielle.

La première allocution a été prononcée par Mr Attaher Maïga, Représentant de la FAO au Niger, au nom de la Coordonnatrice du Système des Nations Unies au Niger. Les systèmes alimentaires subissent des pressions diverses qui sont entre autres démographique, économique, climatique et sanitaire avec comme conséquences l’accroissement de l’insécurité alimentaire et du fardeau de la malnutrition.

La FAO, le FIDA, l’UNICEF, le PAM et l’OMS ont lancé le rapport mondial sur la sécurité alimentaire et la nutrition le 12 Juillet 2021. Selon ce rapport, le coût élevé d’une alimentation saine et la persistance de fortes inégalités de revenus ont mis hors de portée d’une alimentation saine d’environ trois (3) milliards de personnes, en particulier les pauvres, dans toutes les régions du monde en 2019. Plus de la moitié des personnes sous-alimentées dans le monde vivent en Asie (418 millions) et plus du tiers en Afrique (282 millions).

Par rapport à 2019, environ 46 millions de personnes de plus ont été touchées par la faim chronique en Afrique en 2020. Cette situation a été assombrie par la pandémie de la covid-19 avec une réduction du PIB mondial, moins de superficies cultivées, une réduction du nombre d’animaux détenus et des revenus des ménages. La malnutrition sous toutes ses formes reste aussi un défi.

Le monde n’est pas en voie d’atteindre les cibles fixées pour 2030 pour aucun des principaux indicateurs de nutrition. Vaincre la faim et la malnutrition sous toutes ses formes, y compris la dénutrition, les carences en micronutriments et le surpoids, ne se limite pas à garantir suffisamment de nourriture pour survivre : ce que les gens – et en particulier les enfants – mangent doit également être nutritif.

Au cours de l’année écoulée, la COVID-19 et les mesures sans précédent pour la contenir, ont exposé et intensifié les vulnérabilités et les insuffisances des systèmes alimentaires mondiaux. Reconnaissant que les systèmes alimentaires portent une responsabilité essentielle pour la qualité nutritionnelle et la sûreté des aliments abordables ainsi que la durabilité des régimes alimentaires, le rapport de cette année présente six (6) voies pour transformer les systèmes alimentaires et parvenir à une alimentation saine pour tous. Ce sont : (1) Intégrer l’action humanitaire, les politiques de développement et la consolidation de la paix, dans les zones touchées par des conflits ; (2) Renforcer la résilience face aux changements climatiques dans l’ensemble du système alimentaire ; (3) Renforcer la résilience des plus vulnérables face à l’adversité économique ; (3) Intervenir le long de la chaîne d’approvisionnement alimentaire en vue de réduire le coût des aliments nutritifs ; (4) lutter contre la pauvreté et les inégalités structurelles en veillant à ce que les interventions soient favorables aux pauvres et inclusives ; (5) renforcer l’environnement alimentaire et changer le comportement des consommateurs afin de favoriser des habitudes alimentaires ayant une incidence positive sur la santé humaine et sur l’environnement. Cette allocution de Mr Attaher Maïga a été conclue en saluant, au nom du système des Nations Unies, la nomination du Coordonnateur National des concertations les Systèmes alimentaires.

Le discours d’ouverture a été prononcé par Mr Ali Bety, Haut-Commissaire à l’I3N et Coordonnateur National des Concertations sur les systèmes alimentaires. Le Niger a répondu à la demande du Secrétaire Général du Système des Nations Unies invitant les pays à organiser les concertations nationales pour préparer une note de synthèse des résultats des différentes concertations qui sera présentée lors du pré-sommet mondial du 26 au 28 juillet 2021 à Rome en Italie. Après le pré-sommet, le Niger continuera les concertations et l’affinement de la note de synthèse entre août et septembre 2021.

En effet, le sommet mondial sur les systèmes alimentaires aura lieu en fin septembre 2021 à New York en marge de l’Assemblée Générale des Nations Unies. Le Coordonnateur National a rappelé les efforts engagés depuis janvier 2021 dans la préparation dudit sommet sous le leadership du HC3N. Ces Concertations constituent ainsi la première étape du processus qui traduit l’engagement du Pays pour une procédure inclusive dans laquelle les parties prenantes impliquées dans le développement de voies vers des systèmes alimentaires nationaux durables peuvent s’engager. Il s’agit entre autres de la note conceptuelle sur l’organisation des concertations nationales, de la feuille de route plus détaillée sur la conduite de ce processus, validée lors d’une réunion de partage d’information et de lancement des concertations nationales.

Plus concrètement, deux concertations régionales à Agadez et Tahoua et quatre concertations indépendantes ont été organisées avant la présente concertation nationale. Les concertations indépendantes sont : (i) celle sur la diffusion de l’Indice de la faim au niveau mondial comme outil à la prise de décision soutenue par Welt Hunger Hilfe (WHH) ; (ii) le webinaire organisé par le GRET portant sur le thème intitulé « Renforcer le lien entre les unités de production de farines infantiles et les organisations paysannes productrices de matières première » ; (iii) une rue marchande couplée à des conférences et débats sur la valorisation des aliments locaux transformés pour des systèmes alimentaires alimentaires équitables et durables ; (iv) la conférence du Réseau Nigérien d’Information et de Recherche en Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle portant sur le thème « Eau et Assainissement comme déterminants essentiels  des systèmes alimentaires sensibles à la nutrition ».

Une évaluation sur les systèmes alimentaires au Niger a été lancée avec l’appui de plusieurs partenaires dont la FAO. Son rapport provisoire sera disponible d’ici la fin du mois de Juillet 2021. Les résultats de l’ensemble de ces étapes franchies ont permis de produire une liste des thèmes prioritaires qui ont fait l’objet de débats dans différents foras nationaux dont la documentation permettra de finaliser la note de synthèse nationale. Cette allocution a été conclue en saluant la présence du Conseiller Spécial du Président de la République du Niger, ancien Haut-Commissaire à l’Initiative 3N et la forte collaboration entre les secteurs et acteurs.

Après la cérémonie d’ouverture, une présentation introductive et de mise à jour sur les systèmes alimentaires a été faite par le modérateur de l’ensemble des travaux de cette journée, Dr Aboubacar Mahamadou, Coordonnateur de la Cellule Nutrition du HC3N et Assistant au Coordonnateur national des Concertations sur les systèmes alimentaires. Elle a été suivie par l’introduction sur les sessions des travaux de groupe faite par Dr Gervais Ntandou-Bizoutou de l’Assistance Technique du partenariat FIRST (FAO-UE). Cinq groupes ont été constitués dont deux ont travaillé sur la gouvernance des systèmes alimentaires et trois sur des thèmes prioritaires plus techniques qui n’ont pas encore été traités lors des différentes concertations indépendantes et régionales (les chaines de valeurs des fruits et légumes, des pêches et aquaculture et la recherche et l’innovation).

La journée a été achevée par la présentation des résultats des travaux de groupe et une discussion d’ensemble ouverte et enrichissante. Les aspects les plus discutés en plénière ont porté sur :

  1. Les systèmes alimentaires jugés complexes avec des interactions multiples rendant difficile l’intégration systématique des actions nécessaires, utilisant l’approche système, pour les adapter aux besoins nutritionnels ;
  2. Les mécanismes de financement des systèmes alimentaires ont besoin d’un réel changement des pratiques et de paradigme budgétaires publics et des donateurs pour tendre vers des fonds communs sectoriels en plus du fond d’investissement pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle (FISAN). Il faut donc changer note façon de mobiliser et d’utiliser les ressources ;
  3. L’adoption des lois et des décisions qui ne sont pas systématiquement suivies des décrets ou arrêtés d’application rend difficile l’action des secteurs concernés ;
  4. Les prix des fruits et légumes sont élevés en Afrique de l’Ouest en général et au Niger en particulier. Comment le Niger peut-il s’inspirer de l’expérience du Kenya et de l’Afrique du Sud disposant des prix relativement bas desdits produits par exemple et comment mettre en place des politiques d’importations suivies pour combler les gaps actuels ? ;
  5. La pertinence ou non des subventions d’intrants agricoles qui portent au Niger sur les équipements agricoles et les engrais et le besoin de les étendre aux actions post-récoltes ;
  6. La pertinence de l’aquaculture au Niger et son avantage comparatif face aux contraintes de sa mise en place dans un contexte sous-régional où les pays côtiers sont plus avancés. Les importations ne peuvent-elles pas être la meilleure option dans ce cas ? Les défis des pêches artisanales et l’empoissonnement des mares ont été évoqués notamment la surexploitation ou plutôt les faibles capacités de production par rapport aux besoins ;
  7. L’accès est difficile aux semences adaptées des légumes comme la tomate durant toute l’année pour éviter des baisses de production et d’accès saisonniers des légumes frais produits au Niger. Comment rendre les innovations technologiques semencières plus accessibles aux petits exploitants ruraux et péri-urbains ?
  8. La nécessité d’insister sur la biofortification par sélection végétale pour ne pas ouvrir la porte aux aliments biofortifiés par transgenèse ou organismes génétiquement modifiés (OGM) ;
  9. La recherche et la dissémination des innovations sur les systèmes alimentaires coûtent chères et sont sous-financées, c’est pourquoi il faut des priorités bien définies centrées sur des technologies innovantes pour les petits exploitants par exemple pour le financement public. Il est également suggéré des alliances avec des institutions sous-régionales pour mutualiser les efforts. Le financement public de ce secteur doit être prévisible dans la durée pour percevoir ses dividendes ;
  10. La vulgarisation agricole et l’éducation des consommateurs progressent grâce à la création de l’Agence de Promotion du Conseil Agricole et un projet d’envergure nationale d’amélioration de la vulgarisation agricole avec des approches nouvelles d’adaptation des besoins aux marchés ;
  11. Les petits exploitants qui produisent 70 % des calories disponibles doivent être protégés par rapport au gros business agricole même si ce dernier n’est pas encore fréquent mais en progression ;
  12. La compréhension commune en construction est nécessaire et l’utilisation de la terminologie qualifiant les systèmes alimentaires (durable, équitable, sain, sensible….) doit être harmonisée et maitrisée.

La concertation a mis en évidence les nombreux défis à surmonter et l’énorme potentiel d’adaptation des systèmes alimentaires pour devenir dans l’avenir un puissant levier d’amélioration de la justice sociale et du bien-être de tous les nigériens.

16-7-21 – Allocution du Coordonateur CNSA_HC3N

Discours RC_FAOR __CSA_16_07_2021 final

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